Nicolas Alexandre Rodriguez, psychologue en ligne et en cabinet, psychothérapeute, psychanalyste
Démystification
Dans chaque société, des rôles sociaux et sexuels sont naturellement assignés aux hommes et aux femmes selon les mœurs et la culture. Ces rôles étant associés au genre, le fait de s’identifier à ces rôles révèle l’identité de genre ou identité sexuelle, soit le sentiment d’être homme, femme, entre les deux ou ni vraiment l’un, ni vraiment l’autre. On emploie équitablement les deux termes pour désigner la même réalité.
Selon les sources de l’Association des transsexuels (le)s du Québec (ATQ), la transsexualité pourrait concerner de 1 à 3% de la population. L’estimation de cette même prévalence empruntée au gouvernement néerlandais (rapport Bakker, 1993) et présentée par l’équipe de Walter Meyer III (2001) est toutefois plus faible. Les chiffres sont de l’ordre d’un homme sur 11 900 et une femme sur 30 400, mais le même document soutient que d’autres observations permettent de croire à une prévalence plus élevée. Il est intéressant de noter que d’après l’Hôpital général de Montréal, le rapport homme/femme serait d’un pour un.
Le document On the Calculation of the Prevalence of Transsexualism (Olyslager et Conway, 2007) fournit de l’information crédible sur le sujet, vu la rigueur de sa démarche méthodologique. Il en ressort une prévalence d’au moins une personne sur 500. Notez que jusque-là, seules les personnes ayant bénéficié d’une chirurgie de réassignation sexuelle (vaginoplastie et phalloplastie) étaient prises en compte dans ce calcul, créant ainsi une fausse impression de rareté pour une réalité, en fait, beaucoup plus commune. En effet, de nombreuses personnes transsexuelles vivent selon le genre auquel elles s’identifient sans intervention ou thérapie.
Il existe de nombreux termes dans le vocabulaire médical ou dans la culture populaire pour désigner la réalité d’une personne dont l’identité de genre ne correspond pas à son sexe anatomique, car elle existe depuis toujours. Les termes les plus fréquemment employés sont dysphorie de genre, syndrome de Benjamin3, transsexualité, transsexualisme et transgénérisme. De même, comme cette réalité ne concerne pas la sexualité, mais bien l’identité, le mot transidentité circule maintenant dans certaines communautés en Europe.
Aujourd’hui encore, d’un point de vue médical, c’est le sexe anatomique qui sert de référence pour présumer l’identité de genre d’un enfant. Ainsi, un mâle devrait avoir, selon les normes établies dans un système binaire hétéro normatif tel que le nôtre, une identité sexuelle masculine et une femelle, une identité féminine. Lorsque tel n’est pas le cas, on appose alors, sur la personne concernée, l’étiquette transsexuelle ou transgenre. Cette perspective, étant encore très largement répandue, on comprend pourquoi trop souvent la personne dont l’identité sexuelle ne correspond pas au sexe anatomique est injustement considérée comme ayant un problème psychologique puisque c’est le cerveau qui est le siège de l’identité de genre. Il serait probablement plus approprié de considérer le sexe d’une personne à partir de son identité de genre et non l’inverse, mais cette distinction serait impossible à réaliser à la naissance. Il conviendrait peut-être alors de faciliter les démarches ultérieures pour obtenir un changement de la mention du sexe et de revoir les conditions actuelles d’admissibilité pour un tel changement.
Par ailleurs, il y a des personnes transsexuelles ou transgenres dans toutes les classes socioéconomiques, nationalités, cultures, etc., et elles ont les mêmes habiletés que les autres. À cet effet, le site de Lynn Conway est traduit en 18 langues et contient une section présentant de nombreux modèles de transitions réussies d’hommes et de femmes. Acteurs, mannequins, chanteurs, chirurgiens, programmeurs, chefs d’entreprise, biologistes, cardiologues, professeurs d’université, ingénieurs, auteurs, pilotes d’avion, musiciens, architectes, avocats, politiciens et autres, sont autant d’exemples variés de carrières que pratiquent ces individus.
Il semble clair que le transsexualisme de ces personnes n’affecte en rien leurs aptitudes et habiletés physiques, sociales et intellectuelles. Ainsi, il ne devrait pas être considéré comme une maladie, c’est-à-dire une altération de la santé, de l’équilibre. Vue sous cet angle, la pertinence de la classification du transsexualisme comme maladie par l’Organisation mondiale de la Santé, en 1996 semble discutable.
Malgré l’avancement des connaissances scientifiques, à ce jour, les mécanismes complexes à l’origine de l’identité de genre sont encore méconnus. L’étude des grossesses a tout de même permis d’apprendre qu’à la naissance, la région du cerveau que l’on nomme hypothalamus serait déjà «câblée en dure» ou formée définitivement. On croyait autrefois que vraisemblablement, cette région, siège de l’identité, était masculinisée ou féminisée durant la phase d’imprégnation par les hormones au stade fœtal. Selon cette théorie, l’identité sexuelle serait donc innée et non acquise. Le fait que les femmes SICA (syndrome d’insensibilité complète aux androgènes) semblent toujours avoir une identité féminine malgré qu’elles aient des chromosomes XY semble, à première vue, confirmer la thèse hormonale du développement de l’identité. D’après leur code génétique, ces femmes devraient être des hommes, mais leur résistance aux androgènes résultant d’une mutation génétique en a fait des femmes à tous les égards (sauf l’absence des organes reproducteurs internes tels que l’utérus et les ovaires). Il semblait alors permis d’envisager que la transsexualité soit peut-être le résultat d’un processus analogue.
Allant plus loin cependant des scientifiques de l’UCLA (University of California at Los Angeles) sous la supervision de Phoebe Dewing (2003), ont identifié, à l’aide de souris de laboratoire, 54 gènes qui pourraient expliquer les différences entre le cerveau des femelles et celui des mâles chez les mammifères. La nouvelle fût d’abord publiée dans le journal Moleculor Brain Research, puis reprise en octobre de la même année dans de nombreux journaux. À la grande surprise des scientifiques, 18 de ces gènes se trouvaient en plus grande quantité dons le cerveau des mâles, alors que les 36 autres gènes étaient plus nombreux dons le cerveau des femelles, et ce, longtemps avant la phase d’imprégnation par les hormones. À la lumière de ces découvertes, il semble de plus en plus probable que, dans un avenir proche, le mystère de l’identité sexuelle soit enfin compris et expliqué par la science plutôt que par des théories approximatives et des suppositions erronées.
Par ailleurs, aucune étude ou expérience n’a permis jusqu’ici de valider la théorie vieillissante de l’identité acquise selon laquelle il suffit d’élever un garçon à la naissance en tant que fille pour qu’il développe une identité féminine et vice versa. A cet effet, durant les années 60-70, le psychologue John Money, alors affilié à l’Hôpital John Hopkins de Baltimore, au Maryland, a mené une expérience sur le jeune David Reimer4. Les organes génitaux de ce dernier avaient été détruits par accident à 18 mois, lors d’une banale circoncision et l’on a, par la suite, tenté de le convertir en fille en l’élevant comme telle. Cette étude était considérée par plusieurs comme une preuve que cette théorie était valide. Finalement, auront les années 90, il fût révélé par Dr Milton Diamond de l’Université d’Hawaii, notamment connu pour ses travaux sur le SICA, que l’expérience en question, avait au contraire été un tragique échec et que les véritables résultats avaient été sciemment cachés par Money lui-même. Il existe de nombreux cas semblables chez les enfants intersexuels5 opérés en hâte à la naissance dons le but d’en faire des filles (la vaginoplastie étant plus facile à réaliser que la phalloplastie).
3 Harry Benjamin (1885-1986) – Endocrinologue allemand émigré aux États-Unis, est considéré comme étant le premier à décrire avec justesse la condition transsexuelle. Il fût aussi le premier, en 1949, à prescrire la thérapie hormonale.
4 Son histoire est relatée sur de nombreux sites web et dans le livre de John Colapinto (2000).
5 Ambiguïté sexuelle à la naissance, c’est à dire que l’observation visuelle des organes génitaux ne permet pas de déterminer, hors de tout doute, le sexe du nourrisson.
Extrait du «Guide de démystification – Identité sexuelle, Le NEO»
REVOLUTION
Le transsexualisme n'est plus une maladie mentale en France depuis le 10/02/2010
Le transsexualisme n'est plus une maladie mentale. Avec la publication d'un décret au Journal Officiel, la France sort le transsexualisme de la catégorie des maladies mentales. La France devient le premier pays au monde à considérer que le transsexualisme n’est pas une affection psychiatrique.
Le transsexualisme n'est désormais plus considéré comme une maladie mentale. La France devient le premier pays au monde à considérer que le transsexualisme n’est pas une affection psychiatrique, et ce de façon officielle avec la publication d’un décret publié mercredi 10 février 2010 au Journal officiel.
Ce décret n° 2010-125 du 8 février 2010 portant modification de l'annexe figurant à l'article D. 322-1 du code de la sécurité sociale relative aux critères médicaux utilisés pour la définition de l'affection de longue durée « affections psychiatriques de longue durée », publié par le ministère de la Santé, supprime en effet « les troubles précoces de l'identité de genre » d'un article du code de la Sécurité sociale relatif aux « affections psychiatriques de longue durée ».
La ministre de la Santé Roselyne Bachelot, avait déclaré, à la veille de la journée mondiale de la lutte contre l'homophobie et la transphobie, que le transsexualisme ne serait plus considéré comme une affection psychiatrique en France.
Avec la publication d'un décret au Journal Officiel, la France sort le transsexualisme de la catégorie des maladies mentales. La France devient le premier pays au monde à considérer que le transsexualisme n’est pas une affection psychiatrique.
A la veille de la Journée mondiale de lutte contre l’homophobie, le 17 mai 2009, la ministre de la Santé, Roselyne Bachelot-Narquin avait en effet annoncé la déclassification de la transsexualité de la catégorie affection de longue durée 23 « affections psychiatriques de longue durée ».
Selon le ministère de la santé, cette déclassification du transsexualisme « marque ainsi un tournant majeur, l’admission en ALD 23 étant vécue « comme très stigmatisante » par les personnes transsexuelles. »
Les caisses d’assurance maladie avaient alors été saisies sur un projet de décret proposant la suppression des « troubles précoces d’identité de genre » des critères d’admission des affections psychiatriques, mettant ainsi fin à la classification du transsexualisme comme une maladie mentale.
La prise en charge de ces patients sera désormais assurée dans le cadre du dispositif des affections de longue durée dites « hors liste » (31ème maladie), comme le proposait la Haute Autorité de santé (HAS), saisie par Roselyne Bachelot-Narquin dans son avis rendu, en date du 11 juin 2009. Les associations de personnes transsexuelles ont été « pleinement associées à cette démarche. »
Transparentalités
Par Natacha TAURISSON
De qui et de quoi parle-t-on ?
Contrairement à nombre d'a priori infondés, d'amalgames qui n'ont pas lieu d'être, et surtout par manque de connaissances réelles du sujet, la transsexualité est souvent incomprise par notre société.
Être transsexuel féminin ou masculin n'est pas un choix de vie, une perversion ou un fantasme.
C'est une dichotomie, dès la plus petite enfance, entre la construction du sexe psychologique et celle du sexe anatomique, qui s'accompagne d'une souffrance de vie pouvant perdurer plusieurs décennies.
À l'âge adulte, la seule façon pour la personne de vivre enfin en équilibre avec elle-même, est d'entamer un processus complet de mutation sexuelle qui la conduira à terme vers l'harmonie recherchée.
Une vie à laquelle aspire tout être humain peut enfin commencer pour la personne.
Pourquoi la « transparentalité » ?
Le terme de transparentalité s'emploie pour les parents concernés par la transsexualité, qu’elles soient transsexuelles ou qu’elles l’aient été.
Pour tous parents ou futurs parents qui constituent notre société, quelles que soient ses origines, l'accès à l'éducation des enfants doit être appliqué sans restriction, ni discrimination.
Les transsexuel-le-s revendiquent aussi le droit et le désir de parentalité.
Une qualité de vie équilibrée et le bien être de l'individu, peuvent aussi passer par le choix d'une parentalité responsable et assumée. 2
Les motivations d’une démarche volontariste en faveur de la transparentalité
La question de la parentalité suscite depuis longtemps et de façon récurrente des débats, des tribunes médiatiques, des prises de positions politiques ou sociétales, souvent contradictoires, voire parfois crispées.
Dans ce contexte, quel intérêt avons-nous à ouvrir maintenant un nouveau chantier pour élargir ce débat de société à la transparentalité ?
En d’autres termes, quelles sont les motivations qui poussent à aborder sans plus attendre la question parentale pour les personnes trans ou « d’origine transsexuelle » ?
Une société française encore rigide
Les questions de l’identité de genre, du transgénérisme et de la transsexualité, viennent percuter et bouleverser nos repères humains et nos codes sociaux.
Comme toutes questions de société à caractère fort, il faut des décennies, voire des générations avant de constater une évolution favorable à l’épanouissement de la femme ou de l’homme concernés.
Contrairement à d’autres pays, notamment la Belgique ou les pays d’Europe du Nord qui ont beaucoup progressé sur ces questions. La société française, lorsque l’on évoque les questions de sexualité, de fécondité, et de parentalité, fait preuve de crispation et de rigidité sur tous ces sujets.
Nous ne pouvons que constater ou déplorer le long chemin revendicatif qu’il a fallu mettre en place en son temps, sur des sujets aujourd’hui encore parfois tabous, et qui répondaient pourtant enfin aux espérances humaines. Nous percevons encore ô combien certains ne sont pas toujours totalement intégrés dans notre culture, tels que :
- La contraception,
- L’interruption volontaire de grossesse (IVG),
- La fécondation « in vitro »,
- Les droits parentaux et l’autorité parentale conjointe,
- Le divorce,
- L’orientation sexuelle,
- Le PACS,
- …
Nombre de sujets provoquent encore en France des débats de société encore non résolus comme l’adoption, l’insémination, la filiation, …
Nous nous apercevons bien que les notions de « couple » ou de « parentalité » montrent toujours à notre époque des réticences ou des résistances, dès lors que l’on sort des « normes » notamment quantitatives, pour une frange non négligeable de la population, de nos politiques et gouvernants, comme en matière d’homoparentalité par exemple.
Les populations, transsexuelles et transgenres, n’échappent pas non plus à cette remise en cause des valeurs moralisantes établies par notre société occidentale et judéo-chrétienne.
Si nombre de pays permettent aujourd’hui de tendre enfin à la suppression de souffrances humaines par des offres dans les domaines médicaux, chirurgicaux, juridiques et administratifs pour les personnes transsexuelles, ils ne répondent pas ou très peu encore aux droits, aux désirs et aux revendications légitimes d’accès à la parentalité.
Des générations sacrifiées
Il n’est pas rare que des personnes trans, surtout issues de la génération des 40-50 ans, soient déjà parents. Ce fait n’est pas condamnable et ne doit surtout pas être la source de refus de prise en compte de leur conviction profonde, de leur état revendicatif d’une identité opposée à celle de leur naissance. Pourtant nombre de protocoles en vigueur les condamnent aujourd’hui à cause de cette situation.
Afin de mieux comprendre la démarche des personnes trans issues de cette tranche d’âge, il convient de resituer le contexte de l’époque.
Il fut un temps où la transsexualité était incomprise et rejetée de tous les milieux (sociétaux, familiaux, professionnels, voisinage…) de façon encore plus prégnante qu’aujourd’hui. Cet état de fait, dont la non prise en compte et le non traitement par nos pays ne facilitaient pas la compréhension des individus concernés, augmentée par le manque réel de connaissances sur le sujet, générait très souvent un sentiment de honte.
Face à cette situation, il était assez courant que les personnes en concluaient que fonder un foyer, avoir des enfants (néanmoins souvent désirés), disparaître dans la masse pour « répondre au rôle et moule social que l’on attendait d’elles », allaient leur permettre « d’échapper à ce qui les emprisonnait ».
Mais 20 ou 30 ans plus tard, elles vivent de plus en plus mal leur situation identitaire, qui ne cesse de croître au fil du temps, n’ont pas réussi à résoudre leur mal-être (et pour cause !) et ne peuvent plus vivre avec leur sexuation assignée à la naissance. Elles décident alors de se lancer dans un parcours de mutations et de transformations hormonales-chirurgicales et juridiques.
Mais les faits sont là. Ils ou elles sont parents !
Il s’agit alors, non pas de leur enlever leurs responsabilités et fonctions parentales, comme cela arrive encore parfois, ou de porter un jugement médical ou juridique moralisant, irrémédiable et sans retour, mais surtout d’envisager avec les personnes concernées, comment adapter la nouvelle relation enfants/parents et d’étudier les solutions les moins pénalisantes pour tous, les plus adaptées à la nouvelle situation et ce, afin de garantir sans rupture le lien affectif et éducatif entamé.
Il n’y a aucune raison objective, pour qu’après l’annonce de sa particularité ou sa transformation, soit remis en cause ce qui était du domaine du possible et reconnu avant comme « normé ». Les capacités parentales ne sont pas pour autant altérées par simple fait d’un changement sociétal, corporel et administratif. Même si par contre effectivement une accommodation à la nouvelle situation s’impose.
Jeune et plein-e d’espoir
D’autres générations plus récentes sont aussi concernées par la transparentalité.
Grâce aux dispositifs actuels mis en place pour une réassignation sexuelle réussie, nous constatons et assistons à un rajeunissement de la population transsexuelle.
Il ne s’agit pas là d’un phénomène de « générations spontanées », mais bien d’une prise en compte possible de nouvelles tranches d’âges dès la majorité civile. Cette manifestation nouvelle est bien naturellement due à l’offre d’accès au traitement de façon satisfaisante et entière de l’état de transsexualité chez l’individu.
Ces possibilités n’étaient pas envisageables il y a encore quelques décennies pour les générations précédentes. De fait, ce qui n’était pas permis de concevoir avant devient réalisable pour des personnes de 25 ou 30 ans en terme de projection d’avenir et de projet et construction de vie.
Le dessin de ce nouveau paysage générationnel apporte tout aussi naturellement son lot de désirs d’accès à la parentalité, comme tout jeunes de leur génération, bien qu’eux-mêmes soient d’origine transsexuelle.
La nouvelle génération des 20-30 ans d’aujourd’hui, notamment par les réponses apportées depuis les années 90 (médicales, chirurgicales, juridiques, mais aussi associatives, …), ne sont plus dans le même contexte, à âge de questionnement égal, particulièrement au moment de l’adolescence.
Cette évolution sociétale permet à cette tranche d’âge de ne plus tomber systématiquement dans les écueils auxquels étaient confrontés leurs frères et sœurs ainé-e-s.
Une fois leur parcours terminé, leur seule motivation est la plus part du temps de se fondre dans la masse sociétale et de vivre enfin leur vraie vie de femme ou d’homme comme tout un-e chacun-e.
Pour une grande majorité, la construction d’un couple est désirée et pour certain-e-s cela devient réalité. La constitution d’un foyer, le désir d’enfants et d’accession à la parentalité se pose à terme pour nombre d’entre eux, car leur jeunesse leur permet naturellement espérer d’envisager une vie familiale parentale souhaité et assumée.
Aujourd’hui, quasiment aucune possibilité de devenir parent !
Au-delà de « contraintes techniques » qui ne permettent pas pour le moment d’assouvir les souhaits des personnes d’origine transsexuelle, c’est avant tout un système juridique et une approche sociale moralisante, ainsi que le « politiquement correct » qui fait barrage à nombre de possibilités d’accès à la parentalité.
Face à ce positionnement sociétal et à cette situation humaine brimant et inégalitaire, il convient d’ouvrir le débat et de sensibiliser l’ensemble de notre population dès maintenant sans plus attendre, si nous voulons qu’un jour nos dirigeants et décideurs de tous poils, mettent enfin en place un dispositif permettant d’apporter une réponse concrète, à une revendication humaine légitime.
Quelle légitimité, pour qui ?
Notre système législatif et les pouvoirs en place dans l’hexagone national entérinent le fait que des êtres sont plus légitimes que d’autres pour acquérir le droit de devenir parents et assumer les devoirs de responsabilités dont ils leur incombent ensuite.
Mais en fonction de quels critères objectifs, ce fait du Prince se justifierait-il pour une partie de la population, et ce au détriment et vis-à-vis de d’autres humains?
Au nom de quelle morale ?
L’histoire de notre civilisation nous montre les aberrations de dictats moralisants et qui pourtant ont été longtemps la ligne directrice qu’il convenait de tenir, en opposition avec ce qui est accompli dans les pratiques aujourd’hui.
Par exemple :
En s’opposant à la légalisation et à la mise en place de dispositifs appropriés, la gente masculine, ultra majoritaire et garante de la législation au sein de nos Assemblées républicaines, a pendant très longtemps empêché l’interruption volontaire de grossesse, en avançant un argumentaire puritain portant jugements et intimant la conduite à tenir.
Mais n’y sont-ils pour rien tous ces messieurs dans le fait que des femmes se retrouvent enceintes ? Pourtant, cela ne les a pas empêchés de s’opposer pendant très longtemps à l’avortement et à l’IVG…
Allons nous répéter indéfiniment les mêmes erreurs de stratégies en laissant filer le temps au détriment de certaines souffrances d’Êtres en demandes raisonnées.
« La nature », tant solliciter par les personnes moralisatrices et les bien-pensants pour justifier et légitimer les décisions et réglementations en vigueur, sert souvent d’exutoire pour motiver l’incontournable norme salvatrice dont on nous oppose l’argument.
En vertu de quelle suprématie humaine doit-il être érigé des passe-droits et délivré des codes de bonnes conduites pour définir les légitimes, les bons, les véritables ou les mauvais futurs parents ?
Pourtant nous ne sommes pas toutes égales et tous égaux face aux caprices de la création naturelle. Heureux-ses sont celles et ceux qui parviennent de façons naturelles ou réglementaires.
Procréer, atteindre la parentalité sous diverses formes, est un privilège dont seuls bien souvent celles et ceux qui y on accès ne prennent pas réellement conscience. Mais c’est principalement eux qui la plus part du temps « détiennent la vérité » et servent d’étalon pour établir la bonne norme.
Certain-e-s plus légitimes que d’autres…
Un couple dit « classique », marié ou non, vivant ensemble ou non, est considéré comme légitime, et peut à tous moments concevoir et mettre en route une maternité, même non programmée ou mûrement réfléchie, et ce sans demander l’avis de quiconque.
Parmi ces couples, combien d’entre eux pensent un jour que LA solution à leurs problèmes conjugaux passe par l’arrivée d’une progéniture au sein de l’entité constituée ? Qu’advient-il alors de l’équilibre et l’éducation de l’enfant pendant au moins deux décennies, surtout lorsque évidemment l'issue de cet événement aboutit très souvent à un divorce et que ce dernier peut en devenir par voie de conséquence le terme du conflit ?
Tant d’enfants ne naissent-ils pas dans des foyers ou chez des parents « par accident », de façon non désirées ou souhaitées ? Pourtant ils sont bien là et la responsabilité parentale est engagée…
Nous connaissons toutes et tous nombre de cellules familiales où tant d’enfants vivent aujourd’hui dans des contextes peu propices à une éducation équilibrée, épanouissante et favorisante pour une bonne intégration future. Qu’il s’agisse de violences, de problèmes d’alcoolisme ou autres produits toxiques, d’agressivités conjugales, de maltraitances, …
Mais ces situations, bien qu’illégales, font bien parties des schémas rencontrés où les futurs parents peuvent enfanter en quasi-tranquillité, sans que quiconque viennent s’immiscer sur l’opportunité ou non d’une parentalité responsable, réfléchie et assumée.
Face à ces exemples « légaux et légitimes» de potentialités parentales, comment peut-on concevoir encore aujourd’hui que des hommes et des femmes, qui qu’elles qu’en soient leurs origines ou situations conjugales, soient toujours privés de possibilité d’accession aux diverses formes de parentalités, parce que d’origine transsexuelle notamment.
Ces femmes et ces hommes, citoyennes et citoyens à part entière, qui plus est reconnus aussi par l’état civil, qui construisent un projet parental réfléchi et assumé, qui se battent pendant souvent plusieurs années contre les pouvoirs administratifs, juridiques, sociaux, politiques, …, pour espérer un jour voir leur rêve se réaliser, seraient-ils et elles moins capables ou moins légitimes que les autres ?
Notre société bienveillante et notre législateur garant de la défense des institutions, du bon droit et des bonnes mœurs, sont-ils certains de détenir à ce point la vérité en matière du désir irréfragable d’être parent, de sens de la responsabilité parentale, de l’aptitude à l’éducation, lorsqu’il peut s’agir d’un côté pour certain-e-s de quelques secondes de coït (ou non…), basées parfois sur des situations insensées ou désespérées, et celles mûrement réfléchies, qui ont fait preuve d’un déterminisme combatif sans savoir si leur revendication parentale légitime aura une chance d’aboutir ?
En d’autres termes, une partie de la population pour qui ne s’oppose aucune contrainte physique et biologique, parce que classée dans une norme quantitative majoritaire, peut à tout moment devenir parents, et ce sans aucun contrôle sur les répercussions que cela peut engendrer dans certaines situations inconscientes et irresponsables.
À l’inverse, des Êtres, parce qu’ils n’ont pas eut la chance de naître dans le bon corps dès le départ de leur vie, mais qui pourtant démontrent une volonté implacable et un désir raisonné longuement élaboré de devenir parents, d’éduquer et chérir un enfant ou leur progéniture, devraient être mis au pilori sans verdict de compassion et de compréhension de leur sort.
Il serait donc ainsi légitimé pour le commun des mortels de les condamner comme des multirécidivistes jusqu’à la fin de leurs jours, comme s’ils devaient expier de je ne sais quel châtiment naturel.
La France, pays « berceau » des Droits de l’Homme, garante des valeurs républicaines, bâtie sur une société occidentale aux valeurs judéo-chrétiennes si souvent mises en avant, a le devoir de traiter avec équité sa population, sans exclure de ses rangs des hommes et des femmes en souffrance d’une accession aux multiples formes de parentalités.
Formes, déclinaisons et projections
La Transparentalité est un fait.
La transparentalité concerne ceux qui sont déjà parents avant d'entamer leur mutation, et qui revendiquent et se battent pour garder leurs droits parentaux.
Ils ou elles ne doivent plus être dépossédés de leurs droits et devoirs parentaux par les tribunaux de notre pays. Leur responsabilité de père ou de mère ne doit plus être remise en question, et leur autorité parentale bafouée.
Elles ou ils ne doivent pas non plus, se voir opposer leur état de parent, dans les protocoles médicaux en cours. Actuellement, si ces personnes sont père ou mère, on refuse de les considérer comme relevant de la problématique transsexuelle.
La transparentalité c'est devenir parent
La transparentalité concerne ceux qui, reconnus civilement, veulent accéder aux diverses formes de parentalités en devenant père ou mère après leur parcours.
Dans le cadre d'un milieu parental harmonieux et stable, l'Etat ne doit plus s'opposer au droit à élever des enfants désirés.
- Lorsque l'enfant est réellement attendu,
- lorsque la responsabilité de futur parent est mûrement réfléchie,
- lorsque l'accueil du futur enfant est préparé et accompagné, la garantie d'une réussite éducative n'a pas plus de raisons objectives d'être remise en question que pour des parents dits "biologiques".
Plusieurs formes sont envisageables :
a - Par ADOPTION
Contrairement à d'autres pays, l'adoption reste dans notre pays un sujet délicat, notamment pour les personnes ou couples homosexuels.
Pour les personnes d'origine transsexuelle, cette possibilité d'atteindre la parentalité reste encore du domaine de l'inaccessible.
Par jugement du Tribunal de Grande Instance, la procédure de changement de l'état civil de la personne transsexuelle conduit à une rectification de l'extrait de l'acte de naissance.
Pourtant, ces modifications administratives ne sont pas prises en compte au moment d'une demande d'agrément.
Tant que notre nation exigera notamment de justifier l'identité de la personne en lui demandant de fournir un acte intégral d'état civil, l'adoption restera impossible.
b - Par INSEMINATION
La Procréation Médicalement Assistée n'est pas autorisée en France pour les personnes homosexuelles.
Pourquoi, en France, "pays des Droits de l'Homme", sommes-nous encore obligés pour la PMA de nous tourner vers des pays étrangers, ou voisins comme la Belgique ?
Chez les personnes concernées par la transsexualité, la PMA est marginale mais reste possible uniquement pour les personnes dont c'est le futur père qui est d'origine transsexuelle, et ce, dans le cadre d'un couple hétérosexuel.
Le père est alors considéré comme stérile. Dans ce cas on procède à l'insémination de la partenaire par un donneur anonyme. Un seul CECOS sur 23 en France accepte jusqu'à présent de la pratiquer.
D'autres formes d'inséminations sont revendiquées :
- Dans le cadre d'un couple lesbien, dont une des personnes est d'origine transsexuelle, l'insémination par donneur anonyme de la partenaire "biologique" est demandée. Nous nous retrouvons alors confrontés devant la même problématique que dans le cas d'un couple homoparental.
A l'heure actuelle, la procréation par une personne féminine d'origine transsexuelle n'est pas médicalement possible. Pourtant nombre de ces femmes souhaitent accéder à la parentalité.
- Dans le cas d'un couple hétérosexuel, seul le recours à une mère "porteuse" pourrait être envisageable. Dans ce cas l'insémination pourrait s'effectuer avec le sperme du futur père.
Si la femme vit seule, c'est l'insémination par donneur anonyme qui s'impose dans ce cas.
- Le schéma est similaire pour un homme d'origine transsexuel vivant seul.
Certaines personnes, qui ont effectué une mutation dans le sens homme vers femme, procèdent à la congélation de leur sperme avant le début de l'hormonothérapie. Elles espèrent ainsi pouvoir génétiquement contribuer à la création de leur future progéniture.
- L'insémination de la partenaire biologique, par les paillettes congelées de sa compagne d'origine transsexuelle, est alors demandée dans le cadre d'un couple lesbien.
- Pour un couple hétérosexuel dont c'est la femme qui est d'origine transsexuelle (ou pour une femme vivant seule), l'utilisation de ses propres gamètes congelées, dans le cas du recours à une mère "porteuse", devrait être envisagé de la même façon.
D'autres hypothèses peuvent être avancées dans l'avenir :
La technique chirurgicale mondiale n'offre pas encore actuellement de possibilités aux femmes d'origine transsexuelle d'accéder à la procréation.
Pourtant, d'après certains chirurgiens, le procédé est non seulement envisageable, mais techniquement possible par greffes. C'est ce qu'avance notamment le Professeur Yvon MENARD qui exerce à Montréal, au Québec (Canada), et pratique sur plus de 200 personnes par an les opérations de réassignation sexuelle.
Bien entendu dans l'avenir cette éventualité permettrait d'offrir à de nombreuses personnes des perspectives parentales intéressantes et inespérées pour les futurs parents.
Pour arriver à réaliser un jour cet espoir pour une femme d'origine transsexuelle de mettre au monde son enfant, il faudra bien entendu pratiquer les techniques déjà employées dans le cas de la "fécondation in vitro".
Répondre à l’interpellation de la transparentalité
Quasiment chaque schéma exposé ou sous-tendu dans cet inventaire, modifie, voire transgresse, les concepts établis de la parentalité.
Les situations génétiques, les positionnements, les rôles sociaux, sont de fait bouleversés, et nombres de situations nouvelles sont créées.
L'éthique, chère à certains, bouscule évidemment notre éducation occidentale. Mais c'est aussi à ce prix que nos sociétés ont accru leur évolution.
L'avortement est un des exemples les plus marquants de ces dernières décennies. Pourtant ne permet-il pas notamment de libérer tant de femmes de certains carcans ? Pourtant, comme ce que revendiquent les transsexuel-les, l'avortement a enfin permis à la femme d'accéder à la liberté individuelle à disposer de son corps...
La transparentalité est une réalité dont notre société ne peut feindre d'ignorer l'existence.
La transparentalité est une pièce supplémentaire dans l'échiquier des constructions familiales actuelles à laquelle il convient de répondre sans détour moralisateur.
C'est un lieu commun du socialement ou du politiquement correct, que d'ériger en normes absolues les "référents masculins et référents féminins".
En l'espèce, certains aspects de la revendication transsexuelle n'abondent-ils pas dans ce sens ?